UN ARTISTE OUBLIE....

Il est certains hommes dont il n'est nul besoin de rappeler leur existence passée....les poètes, les écrivains, les musiciens, et tant d'autres....

Mais qui se souvient de Rafael Padilla, dit "Chocolat", comment restituer à ce grand clown sa grandeur, oublié de tous...Gérard Noiriel, historien, spécialiste de l'immigration et du racisme remet en lumière le destin du premier clown noir du cirque Français dans son livre intitulé "Chocolat".

Chocolat est un ancien esclave,  né à Cuba, acheté pour 18 onces à la Havane, emmené par son maitre Espagnol en Europe. A Paris, il découvre une société bourgeoise et populaire en plein essor tant au niveau industriel, qu'au niveau du développement des loisirs, le Cirque à la Belle Epoque est un loisir trés prisé de tous.

Chocolat va exploiter ses dons burlesques pour en faire un atout et va former un duo de clowns superstars avec Footit , le clown blanc, ils gardent le haut de l'affiche durant 20 ans dans l'enceinte du cirque d'Hiver où gratins/crottins mélangent leurs effluves.

Sous cette 3ème République ,le "nègre", est considéré comme un être subalterne, Jules Ferry, dans un discours dira " les races supérieures ont le devoir de civiliser les races inférieures"......  Chocolat fait rire ,beaucoup rire....

Tout bien pensé, ce n'est pas drôle du tout.

En effet, en cette fin du XIXè, on assiste à l'éclatement de l'affaire Dreyfus, celle ci crée un antisémitisme exacerbé dans cette France Républicaine et divisée. C'est dans ce climat social que Chocolat connait la gloire, avec ces clichés imparables ...souffre douleur, il est agonisé d'injures telles "avance sale nègre!", il est roué de coup..., son humiliation garantit les éclats de rires. Le duo Chocolat/Footit  symbolise la domination coloniale.

Le tout Paris se dispute pour assister à cette "animalisation" du clown noir , il a du succés, beaucoup de succés Chocolat.

Toulouse Lautrec peint un tableau le représentant avec un faciés animal, il est filmé par les frères Lumière, il est célébré par Colette dans "GIGI",, il inspire Bergson pour le rire, il va jouer dans les hopitaux pour les enfants malades, il est à l'origine de l'expression "être  chocolat"......c'est un trés grand de l'époque Rafael Padilla dit Chocolat.....

Vers les années 1905, le vent tourne, Chocolat ne fait plus rire....c'est l'époque où la presse dénonce le lynchage des noirs en Amérique, il n'était décemment pas possible d'applaudir un noir qui se fait rouer de coups par un Blanc sur la scène du Cirque....

Dés lors Rafael/Chocolat court aprés les cachets, mais....qu'un nègre fasse le pitre "passe encore" , de là, à vouloir être comédien, un comédien noir " qui plus est, quelle aberration"!....Chocolat ne peut pas rebondir dans une deuxième carrière....victime de racisme.

Ce pionnier du clown, du cinéma muet, du rire auprés des malades, enfin dirais- je , ce thérapeuthe, meurt en 1917 dans la misère et l'anonymat.

 Il est dans la terre même, dans un carré pour indigent au cimetière protestant de Bordeaux......si par hasard, vous y passez.......                     

-----à bientôt----

                                MICJI

Comments

[Dominique Blonde]

J'avais entendu parler de Rafael Padilla mais je ne connaissais pas sa sombre histoire. Merci Michèle.

[curieuses]

Je découvre Rafael Padilla dont je ne connaissais même pas le nom ! Si le film passe j'irai le voir !

Bises

Danielle

[jeanpierreroses]

Je pensais aller le voir au cinéma au vu des critiques élogieuses. J'irai donc

Tu nous emportes dans sa biographie avec passion et c'est justifié.

Sa triste fin ne doit pas nous faire oublier qu'elle existe encore, surtout du coté de l'ouest en Alabama (il me semble) avec des shérifs qui ont des doigts de gâchette .

Bonne soirée..Bises......JP

[dam72]

C'est triste comme histoire!!

Je ne connaissais pas non lus ce personnage!

Si je peux j'irai voir le film!

Bisous

[gisp]

Très belle histoire que celle de Chocolat... très belle et fort triste...Je ne connaissais pas du tout ce personnage et son histoire, à travers votre plume, m'a touché.

Merci à vous pour ce morceau de vie d'une autre époque.