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REGARD
6 février 2018

ALBERTINE SARRAZIN, liberté d'une femme en devenir....

                                                                                                                   

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*( ....) le ciel s'était éloigné d'au moins dix mètres , le choc avait dù casser les pierres.....le silence atténuait l'explosion d'étoiles dont les retombées crépitaient encore dans ma tête....une allumette traçante, une étoile filante, un anti brouillard, non, c'est la forge de ma cheville qui illumine toute la traverse (...)...extrait du roman L' Astragale.

Albertine Sarrazin,  écrivaine à la destinée étrange et unique dont voici un court rappel , est native d'Alger en l'an 1937.

Albertine Sarrazin possède cette beauté singulière des pays du sud, un regard éclatant, noir, rieur et vif, une boule de feu, incandescente de vie., elle est la seule écrivaine, à ce jour, à raconter l'histoire de sa courte vie dans l'enfer des prisons, son parcours de délinquance,dans ses romans édités aux éditions Pauvert dont , "l'Astragale" en 1965, "la Cavale" la même année, la "Traversière" en 1966.

Il est difficile de réaliser l'aventure humaine de cette jeune femme, en mutation perpétuelle.

A l'àge de 18 mois elle est abandonnée à l'Assistance publique à Alger,c'est  un couple  de quinquagénaire qui en 1966, l'adopte , lui colonel à la retraite lui donne une éducation religieuse trés rigoureuse, le couple est issud'un milieu bourgeois

C'est une enfant intelligente qui apprend vite, avide de savoirs et de connaissances, elle obtient son bac avec mention bien et de nombreux prix d'excellence.

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Albertine Sarrazin

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Le père adoptif d'Albertine

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Albertine et sa mère adoptive

 cependant Albertine se sent mal à l'aise dans cette vie étriquée et morne, elle fait preuve d'agressivité, devient rebelle , indisciplinée.

*(....) j'étais la fille d'un couple vieux, soudain tout m'ennuyait, devenait pàle, j'avais des envies de casser, de battre, le chemin d'être grande s'étirait, infini...alors j'ai commencé à envisager des raccourcis(...)* extrait du roman "la Traversière".

*(....)Je me découvrais, avec bonheur, toutes sortes d'hérédités perverses, car enfin!,j'avais compris ,  ces gens là ne m'avaient pas faite, je ne pourrais -le voudrais je-  jamais appartenir à eux et à leur monde(...)* extrait de la bibliographie.

En fait de raccourci, son père la fait enfermer à la prison de correction  "le Bon Pasteur"....un couvent qui dans les années 50/60 avait pour mission de remettre dans le droit chemin des filles dites "perdues", administré par des religieuses dures et àpres et sans àme,.... les cheveux  des prisonnières étaient rasés, leur poitrine bandée...la femme qu' elles représentaient devait être niée jusqu'à la déshumanisation .

Ces institutions infàmes ont été fermées en 1970. Mais  c'est sans compter sur l'obstination d'Albertine Sarrazin qui y  passe la seconde partie du bac ,par correspondance. Elle sort du Bon Pasteur à sa majorité,elle a  21 ans.

Pendant ces 6 années d'enfermement, son père en profite pour révoquer son adoption et la désavouer.

Seule et démunie, elle se réfugie à Paris accompagnée d'une amie .....son désir de vivre, d'exister est fort....pour subsister, elle se lance dans les petits vols,..... à l'occasion , elle vend son corps puisque c'est tout ce qu'elle possède.

En 1953, suite à un hold up qui tourne mal, elle est arrêtée.....s'ensuit un  procés,.... Albertine Sarrazin, toujours rebelle nargue ses juges disant:

*(...) je n'ai aucun remord, quand j'en aurai, je vous préviendrai(...)*,

il n'en faut pas plus pour déplaire à ses juges ..... des personnages qui ne supportent pas les gens plus intelligents qu'eux! .....

*" c'est vrai, ce que raconte le bavard, nous n'avons jamais eu notre chance, nous n'avons jamais reçu que des coups de flingues répétés, dont les cicatrices n'ont jamais eu le temps de disparaitre"*....dit Albertine lors du procés......Albertine une àme indomptable à l'existence piétinée, sacrifiée.

elle écope de 7 années de prison à  la forteresse de Doullens.

A Doullens, il n'y a qu'un mur  de 10 mètres entre  Albertine et .la liberté .....elle choisit la Liberté....elle saute les 10 mètres, se réceptionne mal.

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Vestiges de la prison de Doullens

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Le mur de la forteresse de Doullens

L'Astragale brisée, ce petit os du talon ,  qui donnera le titre à son premier roman, ....*"le choc avait dù casser les pierres"*, écrit elle....elle git par terre, le hasard  à parfois le visage du bonheur, c'est un jeune homme Julien Sarrazin, un émietté comme elle ,qui la ramasse, qui la cache, qui la fait soigner et qui l'aime....elle subit plusieurs opérations....leur cavale est longue et bousculée.

La justice n'a de cesse, Albertine est rattrapée en 1958 et doit finir sa peine à Doullens....là, elle étudie la philo, l'Anglais, écrit  des poèmes, débute "Times, journal de prison", elle écrit "l'Astragale" pour Julien dit elle, dont elle est trés amoureuse....elle l'épouse entre deux gendarmes, qu'importe , àpre comme un désert, elle poursuit ses écrits par "la Cavale", ensuite "la Traversière"....

Son style d'écriture est incomparable, fait d'argot, trés critiqué  à l'époque, et de poésie, d'un humour ironique, d'un cinysme cinglant parfois romantique, un style furieusement authentique et rarement trouvé dans des oeuvres littéraires.

*(....) je suis le bic, moi, rien qu'une toute petite pointe de bic, avec des griffes et des dents(...)*...extrait du roman La Cavale.

Ses romans édités aux éditions Pauvert ont un succés immédiat et dépasse l'exagone, on ne compte plus les ventes en unités mais en kgs.

En 1966, Albertine Sarrazin obtient le prix des Quatre Jurys, une sacré revanche vis à vis de cette société aux moeurs ligotés et qui lui fut hostile.

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 C'est aux Matelles, prés de Montpellier  qu'elle va enfin vivre heureuse auprés de Julien, où ils acquièrent un vieux mas qu'ils nomment "l'Oratoire", ils en rêvaient depuis si longtemps!!.....pour la première fois, ils avaient quelque chose à eux, un toit pour être heureux.!

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"l'Oratoire" aux Matelles

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Le destin s'acharne, Albertine, fragilisée doit subir l'ablation d'un rein...bah!, dit elle à ses amis "une simple formalité".

Son étrange  destin s'achève ce 10 Juillet 1967, elle a 29 ans , elle dort apaisée un bouquet de lavande sauvage aux creux des mains.

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Le procés intenté à la clinique par Julien Sarrazin prouve que l'anesthésiste ne possédait pas de diplome, il ne connaissait ni l'àge ni le groupe sanguin d'Albertine, la clinique ne possédait pas d'appareil de réanimation. Cette dernière  a été condamnée à 90.000 frs d'amende  ce qui correspond environ à 100.000 euros aujourd'hui, somme conséquente pour l'époque , le motif évoqué fut l' homicide involontaire.....

C'est à la suite de ce procés que les hopitaux et les cliniques de France, tous les chirurgiens, allaient changer et prendre l'anesthésie au sérieux.

Albertine Sarrazin repose à "l'Oratoire" avec Julien, prés de deux cyprés.

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*"ECRIRE DES TRUCS N'EST RIEN, LE DIFFICILE C'EST DE LES VIVRE"....extrait du roman" La Traversière".

----à bientôt-----

MICJI

 

 

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Commentaires
B
Bonjour <br /> <br /> Petit détail sans grande importance: la photo publiée de "l'oratoire"n'est pas la bonne, peut être s'agit il d'une photo de la "tanière" au hameau de Camias à Saint Jean de Majencoules avant dernière résidence d'Albertine SARRAZIN.
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B
Si vous voulez vraiment bien connaître Albertine, ne manquez pas la biographie écrite par Josane Duranteau qui a de plus préfacé et expliqué la plupart de ses livres posthumes. Cette excellente biographie est épuisée mais on la trouve facilement sur les sites de ventes d'occasion en ligne.
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J
Très bel article Michèle,<br /> <br /> J'ai L'astragale et son recueil de poésie (que je vais reprendre, tu m'en donnes envie). Elle n'est pas une très grande poétesse, mais ses mots évoquent parfois le jamais dit, avec des mots simples, mais forts.
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B
Je suis allé aux Matelles au mois de juillet. Possible d'échanger par messagerie ? Donnez-moi une adresse email ou un n° de tél
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S
Je suis toujours connecté.
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